I-Moussa

Nous accueillons Ibrahim Moussa

Enseignant-chercheur, sociologue et maître assistant à l’Université André Salifou de Zinder au Niger, Ibrahim Moussa est accueilli à l'IREMAM du 17 novembre 2022 au 13 janvier 2023 dans le cadre de son projet de recherche « Les nouvelles formes de militantisme islamique au Sahel ».

Résumé du projet de recherche

Les peuples d’Afrique subsaharienne ont très tôt adopté l’islam comme Religion. L’islam, ancré dans leur imaginaire collectif, s’est progressivement constitué comme un référent culturel et idéologique. A dominance confrérique, l’islam s’est vu pénétré par des mouvements réformateurs qui s’émoussèrent avec l’avènement de la colonisation. 
Les luttes pour les indépendances engagées par les élites intellectuelles formées à l’école occidentale ont conduit à la formation des nouveaux États-Nations, dont la gestion politique, culturelle et économique s’inspirait du modèle occidental. Le retour de l’ère démocratique dans les années quatre-vingt-dix a renforcé les libertés fondamentales et l’exercice de la souveraineté nationale. Ces instants de luttes politiques étaient également une occasion d’affirmations identitaires et d’éveil des courants réformateurs galvanisés par le dynamisme d’une forte réislamisation de la société. 
Le Niger est marqué ces dernières décennies par une mutation et une reconfiguration de son champ religieux. Le religieux devient la matrice centrale à partir de laquelle les représentations et les pratiques collectives s’élaborent. En dépit du principe de la laïcité en vigueur, force est de constater que celui-ci est constamment défié par des acteurs qui militent pour une prise en compte de la religion dans la sphère politique. Ces nouveaux acteurs qui revendiquent l’héritage du réformisme religieux, n’ont guère pu se constituer en partis politiques, mais ont réussi tout de même à s’imposer au sein de la société civile. 
Le militantisme idéologique se transforme de plus en plus en luttes armées au nom d’idéaux religieux défendus par des acteurs que les Etats peinent à contenir. Ces actions djihadistes coïncident avec une intrusion de la religion dans l’espace public, une médiatisation des discours mondialisés et transnationaux sur l’islam et une reconfiguration du monde qui découle de la guerre Russo-ukrainienne. En effet, cette guerre a des répercussions géostratégiques majeures dans les pays de la sous-région ouest-africaine.  
L’on se demande si la combinaison de ce discours politique de plus en plus réceptif et les finalités sociales de la loi islamique posées comme une alternative face aux échecs multiples de l’Etat dans ses missions ne conduirait-t-elle pas à l’émergence d’une nouvelle pensée politique ? Aussi, l’offre des mouvements djihadistes fondée sur un ordre politique islamique qui prendrait en compte les préoccupations idéologiques et identitaires des jeunes ne se poserait-t-il pas comme une solution alternative face aux mécontentements et à la marginalisation ? La montée des mouvements djihadistes nourrit idéologiquement par un tel discours ne serait-il pas susceptible d’accélérer l’éclosion de cette pensée politique ? Au fonds, n’assiste-t-on pas à la naissance d’un islam politique entretenue par des acteurs religieux radicaux ? Quelle sera alors la place des valeurs démocratiques comme la liberté, l’égalité et la citoyenneté ?