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Photo : couverture du manuscrit de la biographie d’al-Sanūsī conservé à la Bibliothèque Nationale de Tunis

Appel à contributions pour un colloque intitulé « Muḥammad b. Yūsuf al-Sanūsī, entre islamologie et sciences sociales »

Colloque international hybride du 31 janvier 2023 au 1er février 2023, Centre Jacques Berque et Institut NIMAR, Rabat, Maroc. Organisé par Ilyass Amharar (CJB-IREMAM).

Comité scientifique : El Mehdī Ben Muḥammad al-Saʿīdī (Université Ibn Zuhr – Agadir), Khaled El-Rouayheb (Harvard University), Caitlyn Olson (Oxford University), Tal Tamari (CNRS), Dorrit Van Dalen (Université de Leyde), Khālid Zahrī (Université ʿAbd al-Malik al-Saʿdī – Tétouan), Ahmad Arif Zul-Kifl (International Islamic University Malaysia), Ilyass Amharar (IREMAM-CJB).

Date limite d’envoi des résumés : 20 septembre 2022. Télécharger l'appel en français, en arabe et en anglais.

Argumentaire

Né en 838-9/1435-6 et mort en 895/1490 à Tlemcen, Muḥammad b. Yūsuf al-Sanūsī est sans doute le théologien ašʿarite le plus célèbre du Maghreb. Les premiers travaux occidentaux sur cette figure (Wolf 1848) ont souvent été extrêmement expéditifs, et ne mettaient généralement l’accent que sur le rôle pédagogique que le théologien de Tlemcen a joué dans l’enseignement de l’ašʿarisme au Maghreb à travers ses ʿAqā’id (sg.ʿaqīda : profession de foi). En moins de trois siècles, l’enseignement des textes théologiques d’al-Sanūsī a connu une importante diffusion dans le monde musulman ; la traduction de ses traités en de nombreuses langues vernaculaires, tels le tašalḥīt (Van Der Boogert 1997), le fulfulde (Van Dalen 2016), le bambara (Tamari 2019) mais aussi le malayo (Bruckmayr 2016) témoigne d’une grande popularité de ses textes de l’Asie du Sud-Est à l’Afrique de l’Ouest. La péninsule Ibérique (Cassasas 2016) ou encore le Sud de l’Afrique (Davids 1985) n’est pas non plus en reste.

Dans la chaîne de transmission (sanad) de la doctrine ašʿarite au Maghreb, il représente un maillon important. Mais s’il est vrai qu’al-Sanūsī a contribué par ses petits traités à rendre la doctrine ašʿarite accessible à un grand nombre, il ne doit pas pour autant être réduit à un simple «vulgarisateur» ; ainsi, sa ʿAqīda Kubrā et son commentaire rédigé par lui-même, méritent d’être considérés comme une des œuvres majeures de la tradition ašʿarite (El- Rouayheb 2015). Pour autant, le rôle de réformiste ou revivificateur (muǧaddid) que lui reconnaissent les sources primaires peut être interrogé. Les récents travaux menés sur certains de ses prédécesseurs aujourd’hui inconnus (Amharar 2020) ou sur des commentaires de la Muršida ont montré que le Maghreb semble avoir connu une activité théologique ininterrompue, ce qui entre donc en contradiction avec l’idée reçue selon laquelle l’enseignement de l’ašʿarisme juste avant al-Sanūsī était très faible, voire au point mort, justifiant ainsi son rôle de réinitiateur de l’école.

Lauréat de l’appel à projets du Bureau des Cultes (Ministère Français de l’Intérieur), abrité par l’IREMAM, le projet « Pour une histoire de l’ašʿarisme au Maghreb », s’articule autour de deux axes parmi lesquels la réalisation d’un colloque réunissant les études les plus récentes sur al-Sanūsī. Dans le sillage des travaux de Sabrina Mervin, il s’agira de mener ce projet dans une perspective de dialogue entre l’islamologie et les sciences sociales, afin d’aborder la vie et l’œuvre d’al-Sanūsī à travers des approches croisées. Ainsi, si la doctrine et l’œuvre du théologien seront évidemment abordées, les aspects anthropologiques de la transmission et la traduction de ses traités en contexte africain ou asiatique seront également mis en avant. Enfin, l’émergence récente d’un enseignement des ʿAqāʾid dans les mosquées et instituts en ligne en contexte européen et anglo-saxon doit susciter l’attention des sociologues, à l’heure du retour d’un traditionalisme « maḏhabique » (Pierret 2011).

Ce colloque, dont les actes feront l’objet d’une publication, appréhendera donc al-Sanūsī et sa pensée à travers le prisme de l’islamologie et des sciences sociales selon trois axes.

1. Premier axe : la pensée théologique d’al-Sanūsī

- Un tournant dans l’ašʿarisme maghrébin ? Réévaluation du rôle d’al-Sanūsī à travers une étude de l’activité maghrébine pré-sanussienne en kalām.
- Son rapport à la falsafa (Avicenne puis al-Rāzī).
- Al-Sanūsī et la logique (al-manṭiq).
- Nouvelles éditions de ses textes.

2. Second axe : la réception de cette pensée au Maghreb et dans tout le monde musulman. Commentaires, traductions et enseignements

- Commentaires maghrébins et non-maghrébins des ouvrages d’al-Sanūsī.
- Influence de l’œuvre d’al-Sanūsī dans la pensée ašʿarite postérieure (XVIe siècle à nos jours).
- Le rôle des ʿAqāʾid dans l’enseignement de l’ašʿarisme dans le monde musulman : Afrique (ex : Mali, Guinée, Afrique centrale sudanique mais aussi Zanzibar) en Asie (du Sud-Est comme la Malaisie ou l’Indonésie ou Asie centrale comme le Tadjikistan) en Eurasie (Tatarstan, Tchétchénie, Daghestan) mais aussi en Europe (anciens territoires ottomans, péninsule Ibérique etc).
- L’enseignement des ʿAqāʾid dans les sociétés prémodernes et son introduction dans les grandes universités (al-Azhar, al-Qarawiyyīn, al-Zaytūna).
- L’enseignement des ʿAqāʾid comme vecteur d’un « islam du juste milieu » dans des sociétés musulmanes d’aujourd’hui, ou comme symbole d’un retour à un « islam madhhabique » dans les communautés musulmanes vivant en Occident. Les modalités de ces enseignements (à la mosquée en France, l’émergence des instituts en ligne, formation à l’étranger etc.).
- Les traductions des ʿAqāʾid en langues vernaculaires (bambara, malayo, maninka, amazigh, turc, tatar…) : l’histoire de ce processus. Le rapport à la langue arabe. Les langues vernaculaires comme instrument d’un dis- cours intellectuel.
- Les ʿAqāʾid à travers leur matérialité : circulation des manuscrits, étude de copies princières, fonction spirituelle (baraka), usages populaires etc.

3. Al-Sanūsī et son époque (IXe/XVe siècle)

- Le climat politique de Tlemcen a-t-il pu entraîner des conséquences sur sa pensée ?
- Faisait-il autant autorité à son époque que postérieurement ?
- Peut-on parler d’un avant et un après al-Sanūsī ? A-t-il marqué la vie intellectuelle de son époque ?
- De potentielles connexions avec des savants d’Orient ont-elles existé ?
- Al-Sanūsī est-il finalement un argument supplémentaire invalidant la théorie du déclin (inḥiṭāṭ) ?

Modalités de participation 

Chaque intervention durera vingt minutes auxquelles s’ajoutent dix minutes d’échanges avec le public. Les langues utilisées seront : l’arabe, le français et l’anglais. Les frais de vol et de séjour des participants seront pris en charge.

Le résumé (1 page maximum) avec nom, prénom et établissement de rattachement du participant devront être envoyés à l’adresse suivante : alsanucicjb@gmail.com
- Date limite d’envoi des résumés : 20 septembre 2022.
- Date d’annonce des propositions retenues : 20 novembre 2022.
- Date de réception des articles dans leur version finale : 20 juin 2023.

Année
2022